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Marsad Majles
  • Audition des députés signataires de l'initiative législative relative à la Cour Constitutionnelle
L'heure prévue pour la début de session : 14:30
Début de la session 15:00
Fin de la session 16:30
Heures de retards 30mn
Taux de présence 52.38%

La commission de la législation générale s’est réunie en date du 30 Septembre 2015 à partir de 15 heures pour auditionner une partie des députés initiateurs de la proposition de loi N°38/2015 relative à la Cour Constitutionnelle.

Les députés auditionnés sont les suivants: 

Naoufel Jammali (Ennahdha) :

Je voudrai d’abord préciser que nous n’avons pas élaboré cette proposition de loi relative à la Cour Constitutionnelle par esprit de concurrence envers une partie donnée contrairement à ce que pense l’opinion publique et certains députés.

Quand nous avons soumis notre texte il n’y avait pas de projet de loi gouvernemental relatif à la Cour Constitutionnelle soumis à l’Assemblée.

Nous avons donc décidé qu’il était de notre responsabilité de faire un effort pour participer à la construction des institutions constitutionnelles de l’État.

Nous respectons le projet de loi du gouvernement.

Notre démarche lors de l’élaboration de la proposition de loi était guidée par l’esprit des institutions, l’esprit de la démocratie, la suprématie de la Constitution et non pas dans le but de faire en sorte que l’un d’entre nous fasse partie de Cour Constitutionnelle comme certains le disent.

Quelques points concernant le projet de loi :

- Concernant les nominations nous avons repris l’arrangement prévu par la Constitution et nous avons consacré la majorité des 3/5 pour l’élection de la part de l’Assemblée des Représentants du Peuple. Nous avons considéré cette majorité comme une majorité qui d’un côté permet de ne pas laisser le pouvoir de décision aux mains de la majorité et qui évite aussi de l’autre côté le blocage. On ne voit pas d’objection aussi à ce que les députés n’appartenant pas à des blocs puissent proposer des candidats. À notre avis il vaudrait mieux ne pas aller en dessous de cette majorité.

- Au niveau de l’article 7 nous avons parlé des mécanismes de nomination et a notre avis prévoir des candidatures libres ne ferait que compliquer les choses et étendre les procédures, on pourrait même dépasser les délais constitutionnels.  

- Concernant l’avis de la Cour Constitutionnelle, on pense que prendre l’avis est obligatoire mais c’est un avis qui reste consultatif.

- On pense que vous devriez prendre plus en considération le contrôle de la constitutionnalité des conventions, sujet concernant lequel nous avons apporté dans notre proposition de loi des dispositions détaillées, techniques et importantes qui pourraient combler le manque de la Constitution à ce niveau.

-Il faut contrôler la constitutionnalité des projets de lois des conventions mais aussi la constitutionnalité des conventions.

-La Cour Constitutionnelle ne peut pas jouer un rôle moindre que celui de l’ancien conseil constitutionnel.

Merci de nous avoir écouté.

Abada Kefi (Nidaa Tounes) :

Merci pour votre présence.

Concernant la controverse juridique concernant l’avis obligatoire ou pas de la Cour Constitutionnelle je pense qu’il faut d’abord définir les choses par leur objectif, pourquoi faire une Cour Constitutionnelle ? Dans ce cas on pourra dire si l’avis est obligatoire dans des cas et consultatif dans d’autres cas.

Nous avons ici des députés qui ont participé à l’élaboration de la Constitution de 2014.

Certaines dispositions vous avez dit ne sont pas amendables.

Il est dangereux d’interpréter la règle juridique hors du cadre de la volonté du législateur.

Latifa Habachi (Ennahdha) :

Certains point ont été traités d’une manière tellement détaillée qu’au final ça complique encore plus les choses, pourquoi ? 

Par exemple pour les conventions, vous avez prévu beaucoup de détails techniques et de procédures, à mon avis c’est un peu trop.

Où s’arrête le champ d’action de la loi et où commence le champ d’action du règlement intérieur ?

Quel est le critère utilisé pour dire qu’un point particulier rentre dans le cadre de la loi ou du règlement intérieur ?

Pourquoi n’avez vous pas adopté pour l’assemblée des représentants du peuple le mécanisme des nominations et non des candidatures libres.

Yamina Zoghlami (Ennahdha) :

Je voudrais évoquer le point de la majorité pour les nominations faites par l’assemblée des représentants du peuple :

Les experts auditionnés disent que la majorité des 2/3 si elle n’aboutit à rien au 1er et 2ème tour, pourrait être diminuée afin de ne pas avoir de blocage.

Vous avez refusez cela et vous avez tenu à garder une majorité des 3/5, pouvez vous expliquer pourquoi

Les experts ont parlé de la possibilité d’avoir des commissions de filtrages au niveau des tribunaux pour alléger la charge de la Cour Constitutionnelle, qu’est ce que vous en pensez ?

Pourquoi avoir ajouté le dernier paragraphe de l’article 46  de la proposition de loi ?

Neji Jmal (Ennahdha) :

Concernant la différence entre l’avis obligatoire et l’avis consultatif.

Je suis contre les articles inamendables de la Constitution. 

Il n’est pas normal que l’avis d’une institution de 12 membres soit obligatoire pour les 2/3 des élus du peuple.

L’article 144 dispose que le Président de la République peut, après approbation des deux tiers des membres de l’Assemblée, soumettre la révision de la Constitution au référendum.

Cette possibilité pourrait-elle devenir une obligation à chaque fois qu’une proposition de révision de la Constitution est soumise à la Cour Constitutionnelle et que celle-ci la refuse ?

C’est à dire que la soumission de la révision de la Constitution au référendum devient obligatoire. 

Habib Khedher (Ennahdha) :

Je voudrai préciser d’abord qu’aucun des initiateurs de la proposition de loi ni des membres de l’Assemblée des Représentants du Peuple ne veut se retourner contre la Constitution. 

La protection de la Constitution n’est garantie qu’à travers le soutien du peuple pour celle ci. 

La protection de certaines dispositions de la Constitution en les sortant du champ de la possibilité de révision a été mise en place pour protéger les articles, pour protéger le 1er ainsi que le deuxième article. Quant à l’article 75, ce n’était pas pour protéger l’article mais pour protéger l’une de ses dispositions et au niveau de l’article 45 pour protéger les droits et libertés.

Prenons l’exemple du dernier paragraphe de l’article 75 « Aucun amendement ne peut augmenter en nombre ou en durée les mandats présidentiels ».

Est-ce que cette disposition en elle-même est protégée ? Absolument pas.

C’est à dire que ce paragraphe n’est pas venu pour s’auto-protéger mais pour apporter une protection à une autre disposition dans un autre article.

Si une proposition de révision de la Constitution visait à supprimer ce paragraphe, est-ce que cela serait considéré comme une atteinte à ce qui ne peut être révisé ? Probablement par certains.

La protection qu’a voulu le législateur constituant pour la Constitution est relative.

Concrètement, je ne pense pas qu’une personne saine d’esprit présenterait une proposition de révision pour amender l’article 1 ou 2 de la Constitution et quand bien même cette personne aurait existé, je ne pense pas que cette personne pourrait avoir l’approbation de la majorité au parlement. 

L’effort de réflexion se pose au niveau d’autres articles, et je pense que c’était voulu par le législateur, tel que l’article 49 « Aucune révision ne peut porter atteinte aux acquis en matière de droits de l’Homme et de libertés garantis par la présente Constitution. »

Ces dispositions sont très relatives. Si demain on permet les recherches génétiques sur les êtres humains, certains diraient que cela touche à l’intégrité physique et d’autres diraient que c’est du ressort de la science et de la recherche et les deux avis sont constitutionnels. 

Le peuple est finalement seul habilité à décider quel avis prévaut sur l’autre au lieu de laisser ça aux mains de 8 personnes.

Les sujets aptes à se développer dans le cadre des droits et libertés sont liés au développement de la société et sont généralement proie à des avis contradictoires entre des conservateurs et des modernistes.

L’image de la Cour Constitutionnelle qu’on instaure la rend plus proche des personnes âgées, plus penchée vers le conservatisme et donc moins encline au développement social. 

À notre avis, l’avis de la Cour Constitutionnelle doit être soumis à l’Assemblée et publié pour que l’opinion publique en prenne connaissance. Suite à ça, les députés décident soit de poursuivre les procédures de révision ou de se rétracter.

Naoufel Jammali (Ennahdha) :

On nous reproche d’avoir trop détaillé les dispositions relatives aux conventions. 

Les dispositions de la Constitution de 2014 sont problématiques sur le plan des conventions.

 Une grande partie des conventions sort du domaine de la Constitution, c’est ce qu’on appel les conventions techniques qui ne peuvent pas être soumises selon notre Constitution au contrôle de la Cour Constitutionnelle.

La Constitution traite les conventions comme une entité unique or il y a plusieurs types de conventions.

Certaines conventions ont besoin d’être ratifiées par le président de la république après l’approbation de l’Assemblée par contre d’autres n’ont besoin, pour engager l’État, que de la signature de l’autorité compétente.

En se référant à l’article 27 de la Convention de vienne de 1999 sur le droit des traités on peut en conclure que ces traités techniques peut être conclu et engager l’État même si contraire à la Constitution.

On peut avoir des conventions inconstitutionnelles mais nous n’avons aucun moyen de les amender et on devra amender la Constitution.

Les traités internationaux ne sont pas toujours et intégralement obligatoire pour l’État, l’ obligatoriété dépend de la partie ayant signée la dite convention. 

C’est pour ça que dans notre projet, l’autorité qui signe des traités engageant l’État doit prouver par les documents diplomatiques nécessaires qu’elle a été habilité pour se faire, ce qu’on appel le plénipotentiaire. 

Ce point est très important et permettra à la Cour Constitutionnelle de jouer son rôle de contrôle.

Les textes d’approbation des conventions sont toujours très concis et se limitent à disposer qu’il y a eu approbation de la convention concernée, ici la Cour Constitutionnelle contrôle quoi exactement ? 

Les députés aussi avoir le droit de demander à la Cour Constitutionnelle de contrôler le contenu des conventions pour lesquelles ils donnent l’approbation.

Nous avons trouvé cette solution dans la jurisprudence du conseil constitutionnel qui à l’occasion du contrôle des projets de lois d’approbation des conventions contrôlait aussi leur contenu.

Ferida Laabidi (Ennahdha) :

La Cour Constitutionnelle était une des institutions concernant laquelle il y avait le plus d’unanimité dans les avis lors de l’Assemblée Nationale Constituante.

Selon l’article 124 de la Constitution la loi relative à la Cour Constitutionnelle fixe son organisation, les procédures suivies devant elle, ainsi que les garanties dont bénéficient ses membres et à mon avis la proposition de loi a traité de tous ces points.

Parler de l’organisation de la Cour demande beaucoup de détails, ce qui mène aux divergences d’avis. Mais l’idée est de facilité l’instauration de la Cour.

Les règlements Intérieur vont loin et s’approfondissent beaucoup dans les détails. 

Nous avons choisi le mécanisme des nominations à la place des candidatures libre, parce que, ouvrir la porte aux candidatures libres suppose d’abord des procédures très compliquée et ensuite ouvre la porte aux recours ce qui prolongera les délais jusqu’à dépasser les délais constitutionnels.

La majorité des 3/5 a été choisie aussi pour ne pas compliquer les procédures d’un côté et ne pas choisir une majorité simple de l’autre.

Cette majorité pourra aider à accélérer le processus d’instauration de la Cour.

Souhail Alouini (Nidaa Tounes) :

Nous sommes d’accord que cette proposition de loi a d’abord été soumise pour accélérer le processus d’instauration de la Cour Constitutionnelle au temps où le projet de loi n’avait pas encore été soumis par le gouvernement. Je pense néanmoins que notre proposition de loi a motivé le gouvernement pour que celui ci soumette son projet de loi dans les plus brefs délais.

Concernant le droit des députés à présenter des propositions de lois, nous sommes dans un régime parlementaire, et même si nous avons donné au gouvernement des compétences de gestion et d’exécution, le pouvoir législatif reste entre nos mains et présenter des initiatives de lois reste notre droit, un droit même pour les députés faisant partie de la majorité au gouvernement.

Les députés doivent exercer leur droit à l’initiative législative afin de participer à la réforme du pays. 

Pour moi cette proposition de loi est très importante même si elle reste symbolique.

Rim Mahjoub (Afek Tounes) :

La priorité des projets de lois du gouvernement a été initiée avec la 5ème république française et nous l’avons repris de chez eux.

Normalement, c’est les députés de la majorité au parlement qui viennent défendre les projets de loi de leur gouvernement qui reflète cette majorité.

L’adoption des projets de loi du gouvernement par la majorité à l’Assemblée est aussi une preuve de renouvellement de confiance des députés dans celui-ci.

Généralement c’est donc le rôle de l’opposition de  présenter des propositions de lois à côté des projets gouvernementaux, des propositions qui très rarement passent.

Houcine Jaziri (Ennahdha) :

Quand on parle d’un gouvernement émanant d’une majorité parlementaire cela veut dire que celui-ci est supposé travailler nuit et jour en corrélation avec ses députés à l’Assemblée.

Les Ministres, en présentant des projets de lois, doivent essayer de convaincre leurs députés à l’Assemblée de voter pour avant même de les soumettre au parlement.

Aujourd’hui, il y a un problème de communication entre le gouvernement et la majorité au parlement.

Ce n’est pas un gouvernement simple, c’est un gouvernement de majorité très compliqué, la preuve en est les déclarations du Ministre de la Justice hier selon lesquelles il faut amender plusieurs dispositions du code pénal, des déclarations qui sont dangereuses et au sujet duquel il n’a consulté personne avant de les faire. 

Yamina Zoghlami (Ennahdha) :

J’aimerai que petit à petit notre Assemblée reflète un peu plus à chaque fois la vraie société Tunisienne telle qu’elle est.

La Cour Constitutionnelle est la seule institution capable de garantir la suprématie de la Constitution mais la vraie garantie de la suprématie de la Constitution émane que du peuple.

Imed Khemiri (Ennahdha) :

Je remercie les collègues qui ont été derrière cette proposition.

Aujourd’hui nous sommes entrain de finaliser l’étape constituante.

Nous sommes dans un régime politique non stable. Dans les régimes politiques stables et ancrés dans la démocratie ce n’est pas acceptable pour une majorité au parlement de présenter des projets de lois différends ou contradictoires par rapport au projet de loi du gouvernement à qui elle a donné sa confiance. Mais en Tunisie nous sommes encore en période de transition et nous n’avons pas encore une majorité ayant des programmes clairs sur le plan politique économique et social concrétisés au niveau d’un gouvernement représentant cette majorité. 

Souhail Alouini (Nidaa Tounes) :

Cette période requiert de nous un minimum ingéniosité. La Tunisie mène une course contre la montre on ne peut rester à attendre que le gouvernement bouge pour nous présenter des projets de lois afin d’initier les réformes nécessaires au pays. Le peuple attend, il faut donc que nous aussi en tant que représentants du peuple nous prenions des initiatives.  

Naoufel Jammali (Ennahdha) :

J’annonce que les députés initiateurs de la proposition de loi relative à la Cour C ont décidé de la retirer.

Je suis convaincu que notre initiative a la priorité de regard sur le PDL  mais on ne voudrait pas vous causer du retard ou être la cause de ne pas 

Abada Kefi (Nidaa Tounes) :

Votre proposition, vos interventions et vos avis laisseront des traces et marquerons le texte que nous adoperons, nous les prendrons en considération.

Levée de la réunion de la commission de la législation générale à 16h30. La reprise des travaux est prévue pour le Vendredi 02 Octobre 2015 pour commencer le vote du projet de loi organique N°48/2015 relatif à la Cour Constitutionnelle article par article.