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Marsad Majles

Début de la réunion conjointe entre les commissions des Droits et Libertés et des Relations extérieures et des Affaires de la femme, de la famille, de l’enfance, de la jeunesse et des personnes âgées à 10h15 pour audition de la Ministre de la femme concernant le Projet de loi organique N°55/2015 amendant et complétant la loi n°1975-40 du 14 mai 1975 relative aux passeports et aux documents de voyage et le Projet de loi organique N°29/2015 relatif à l'interdiction de la traite des êtres humains et la lutte contre celle-ci

Ministre de la femme, Samira Merai :

Depuis l’assemblée nationale constituante le ministère de la femme avait espéré voir une commission des affaires de la femme mais ca ne s’est pas fait. Je suis heureuse qu’enfin ce soit le cas dans l’assemblée des représentants du peuple, et qu’une commission qui s’occupe des affaires des femmes existe. Le sujet de la violence envers les femmes est un sujet auquel nous devons nous atteler le plus rapidement possible. Vous en êtes conscients en tant que députés. Nous n’avons jusque la en Tunisie aucune stratégie nationale relative à la lutte contre la violence envers les femmes. Nous avons fait un sondage et la chose positive est que 82% des femmes et hommes sont contre les violences faites sur les femmes. En revanche, 80% des femmes qui ont subit des violences ne portent pas plainte. Quand on leur demande la raison elles disent que c’est parce que ca ne change absolument rien à leur situation. Le projet de loi que nous allons discuter aujourd’hui est important dans le sens ou si vous regardez en droit comparé cette limitation n’existe pas. 

Meherzia Labidi (Mouvement Ennahdha):

Ce projet de loi peut être bénéfique à la femme tunisienne mais aussi à la femme étrangère mère d’un enfant tunisien. D’où ma question, qu’en est il des accords internationaux protégeant les enfants. 

Naoufel Jammali (Mouvement Ennahdha) :

Ce projet de loi ne pose aucun problème ou refus de la part de quiconque. Il y cependant une grande différence entre l’égalité devant la loi et l’égalité entre les hommes et les femmes dans la loi. Je vais parler du cas de l’interdiction de travail d’une femme aujourd’hui en Tunisie à cause de son voile. Je pensais que nous avons dépassé cela avec la révolution et avec notre contexte actuel. Je pensais que nous somme la pour défendre tous les tunisiens sans discriminations quelconque. 

Ramzi Ben Fraj (Mouvement Ennahdha) :

Il faudrait être plus clair en ce qui concerne l’égalité de droit entre les femmes tunisiennes et les femmes étrangères. N’oublions pas qu’il s’agit là du droit de l’enfant tunisien qui est en question.

Imed Khemiri (Mouvement Ennahdha) :

Quand on parle de ce projet de loi on parle de l’absence de discrimination entre les hommes et les femmes et la protection de l’enfant. Mais j’ai un problème qui va au-delà de ça. Il y a des milliers de tunisiens qui sont depuis la révolution interdits de passeport, sans aucune raison légitime et légale. Qu’en est-il de ces personnes là, de ces citoyens et enfants ? Par ailleurs, j’estime que le ministère de la femme est le ministère qui protège la femme. Surtout en ce qui concerne son style vestimentaire. Quelque soit sont choix de vêtements le ministère doit être la pour lui garantir sa liberté et le respect de ses droits. 

Houda Slim (Mouvement Nidaa Tounes) :

Il y a encore une grande discrimination entre l’homme et la femme dans les livres scolaires que se soit dans les textes, dessins ou même dans la façon d’enseigner. On discerne entre les rôles de la femme et de l’homme. L’homme lit un journal, la femme est dans la cuisine. Par ailleurs, dans les séries télévisées aussi, l’image de la femme est dégradante. Soit entrain de manigancer, soit dans une impasse de sidi je ne sais quoi, soit entrain de faire la belle. Cette mentalité est acquise par tous ces facteurs. Et la on discute un projet de loi qui peut être vu comme très avant-gardiste par rapport à cette mentalité. Ma question est de savoir si vous avez une stratégie de réforme du système éducatif et par conséquent des mentalités ?

Imen Ben Mhamed (Mouvement Ennahdha) :

Nous sommes encore entrain d’expérimenter des discriminations incroyables dans notre société. Je vais citer la question des congés de maternité. La femme tunisienne est contrainte à faire un choix entre sa carrière et sa maternité et l’homme n’a pas cette contrainte. Il faudrait vraiment amender cette loi. Je veux savoir quand est ce que nous allons recevoir un projet de loi dans ce sens. 

Fatma Mseddi (Mouvement Nidaa Tounes) :

Je suis entièrement d’accord avec ce qu’a dit Imen. La femme a un droit à l’emploi. Ca ne concerne pas simplement la maternité mais aussi les femmes qui veulent travailler mais qui ne peuvent pas a cause de raisons innombrables tel que le refus du mari, l’harcèlement sexuel et j’en passe. 

Mohamed Mohsen Soudani (Mouvement Ennahdha) :

Il y a une image très négative de la femme tunisienne dans les séries télévisées. Je rejoins ce qu’a dit ma collègue. Qu’est ce que vous planifiez de faire dans ce sens ?

Imed Daimi (Congrès Pour la République) :

Qu’en est-il de la situation de la femme rurale ? 

Lilia Younes Ksibi (Afek Tounes) :

La femme n’est pas nommée dans les hauts postes étatiques, des municipalités par exemple. Qu’est ce qui s’est passé ? Je vous rappelle que la constitution dispose de l’égalité entre les hommes et les femmes. Ou est cette égalité ? La loi c’est bien mais il faut surtout le mettre en pratique. C’est très grave ce qui se passe actuellement. Y a-t-il une stratégie de lutte contre ces discriminations ? Parlons des femmes qui se voilent pour fuir le harcèlement sexuel. Parlons-en ! Ces femmes dans les zones rurales qui se voilent toutes pour éviter le regard des hommes ! Ces femmes qui n’osent pas porter plainte contre le harcèlement sexuel dans le cadre du travail par peur de perdre leur emploi. 

Bochra Belhaj Hmida (Mouvement Nidaa Tounes) :

Chaque retard dans la mise en œuvre de la stratégie national de lutte contre les discriminations faites à l’égard des femmes est grave. On aimerait bien coordonner avec votre ministère et trouver une solution à tous ces problèmes.

Ministre de la femme, Samira Merai : 

Je vais commencer par répondre à la question concernant la stratégie nationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Nous avons constitué une commission qui est actuellement entrain d’étudier cette question. Vous êtes conscients que le travail d’élaboration des textes de lois est monstrueux. Nous travaillons actuellement sur un plan de communication. Pas tout passe par les lois. Il faut travailler sur la sensibilisation. Il faut travailler avec les forces de l’ordre. Nous avons un problème de confiance actuellement. Notre stratégie porte sur la prévention qui est un des volets les plus primordiaux dans la société. Puis nous avons la protection des femmes qui ont subit toutes formes de violences. Nous avons déjà des programmes de formation. Nous sommes dans une phase de testing actuellement. Nous avons préparé une charte de comment se conduire avec une femme dans un poste de police. Nous testons actuellement cette charte à Ben Arous et à Tunis. En ce qui concerne la question des stéréotypes et de l’image de la femme en Tunisie et dans la télévision. Vous savez avec la liberté de la presse nous ne pouvons pas limiter grand-chose. Mais nous nous sommes mis d’accord avec la télévision tunisienne afin de passer des programmes éducatifs et de sensibilisation qui vont dans ce sens. Nous travaillons surtout en ce qui concerne la psychologie de l’enfant. La question de l’interdiction du port du voile ne se discute même pas ici. Personne ne peut obliger une femme à enlever le voile ou à le porter. Les faits qui se sont passés là en l’occurrence sont relatifs à des procédures internes. Par ailleurs nous allons créer un comité pour l’égalité au niveau de la présidence du gouvernement, pour éviter toutes formes de discrimination dans la fonction publique.

Bochra Belhaj Hmida (Mouvement Nidaa Tounes) :

Je pense que si le ministère de la femme se trouvait au sein du premier ministère c’est beaucoup plus efficace. Nous avons une expérience en Tunisie qui le prouve. 

Ministre de la femme, Samira Merai :

Non ça n’a rien à voir, je parle des cas de nomination dans les hauts postes. Ce n’est pas l’équivalent d’un ministère. Dans le cadre de notre plan quinquennal nous avons une commission chargée de la femme rurale. Par ailleurs, nous voulons créer une banque de compétences féminines qui permettra aux femmes d’accéder à des hauts postes. Nous avons devons nous aujourd’hui des élections municipales qui sont des conseils élus.  C’est le moment de mettre en œuvre le principe de parité dont dispose la constitution. En ce qui concerne la question de la maternité, il ne devrait pas y avoir de différence entre les secteurs public et privé. Nous sommes conscients que l’Etat doit faire davantage d’espaces de prise en charge des enfants. Nous avons un grand projet de développement économique des femmes. Ce programme reposera sur la discrimination positive. Nous allons créer 50 entreprises totalement féminines dans chaque municipalité. Quand je dis entreprise c'est-à-dire que ca embauchera plus de 3 femmes. Ces entreprises seront créatrices d’emploi et combattront le chômage extrême des femmes dans les régions. On doit se poser la question de savoir pourquoi 46% des femmes ont fait des études et ne trouvent pas d’emploi par la suite. Nous avons pensé à créer une banque des femmes qui accordera des lignes de crédit pour l’entreprenariat. 

Rabha Ben Hassine (Mouvement Nidaa Tounes):

50 000 des femmes de ménages sont des jeunes filles mineures.

Ministre de la femme, Samira Merai : 

Ceci entre dans le cadre de la loi contre la traite des être humains. Cette loi aura pour but de punir  toute personne impliquée dans ce trafic que ce soit ces parents ou des réseaux. Par ailleurs, le seul moyen d’empêcher cela est l’obligation de scolarité. Il ne faut plus qu’il y ait d’expulsion de l’école mais plutôt un changement vers un système de formation technique ou professionnelle.     

La ministre de la femme Samira Merai  quitte la salle à 12h45. Sa représentante prend sa place. 

Houcine Jaziri (Mouvement Ennahdha) :

Nous allons ouvrir des chantiers impossibles à surmonter. La politique est de prendre en compte tous les contextes et toutes les situations possibles. Il faut penser à améliorer la situation de nos citoyens résidant à l’étranger. Je vous rappelle que jusqu’à récemment ces personne là n’étaient pas qualifiés de tunisiens à l’étranger mais de travailleurs à l’étranger. Je suis père de deux filles et deux garçons et ma préférée c’est ma petite fille. Nous n’avons pas en Tunisie un problème majeur de discrimination envers les femmes. Les femmes réussissent, elles vont à l’école. Nous avons en Tunisie des problèmes très simples de déséquilibre familial que nous ne pouvons pas résoudre avec des déclarations politiques et des faux problèmes. En France, le pays du féminisme par excellence, la femme est violentée et sujette au harcèlement, elle est moins payée que l’homme aussi. C’est la raison pour laquelle nous devons avoir une approche basique en Tunisie. Je n’ai pas peur pour les filles. J’ai peur pour les garçons qui expérimentent beaucoup plus l’abandon scolaire, l’abus de drogue, le suicide et j’en passe. Les problèmes d’intégration à l’étranger sont causés par les garçons tunisiens. Les filles réussissent et s’intègre. Ce sont les garçons qui se trouvent impliqués dans des affaires criminelles. Vous en tant que ministère vous êtes responsables de toutes la famille et non pas seulement de la femme. Vous devez avoir une vision plus large et en même temps plus basique afin de surmonter des difficultés qui nous sont propres. Il faut valoriser ce que l’on a et l’optimiser. Au lieu de nous atteler à résoudre de faux problèmes. 

Rabha Ben Hassine (Mouvement Nidaa Tounes) :

Il y a un commerce des femmes qui se fait actuellement. Quand je parle des femmes de ménage qui sont mineures, c’est ça le commerce. C’est une traite qui engendre bien évidement le viol, le harcèlement, et toutes sortes d’abus. C’est ça qui est grave. 

Yamina Zoghlami (Mouvement Ennahdha) :

Le sujet de la femme voilée est à la base résolu. La femme en question a un jugement en sa faveur. J’ai discuté personnellement avec la présidente directrice générale de Tunisair qui m’a assurée que l’histoire est réglée. Je viens de recevoir un message de la part de cette femme comme quoi elle passe bientôt devant le conseil de discipline. Ce jugement n’a pas été appliqué.

Représentante du Ministère de la femme :

Nous avons toujours peur de l’Etat mais il faut comprendre que lorsque l’Etat travaille avec des lois et dans le cadre d’un Etat de droit nous ne devons pas en avoir peur. L’article 13 du projet de loi est  pour aider l’Etat à mener à bien ses missions de protection des enfants. Nous ne devons pas voir peur de cet article mais nous devons bien évidement assurer le contrôle de la justice. C’est vrai que les problèmes ne viennent pas de la loi mais de l’application de celle-ci. En ce qui concerne le travail de 50 000 femmes de ménage mineures, je doute fort que ces chiffres soient véridiques. D’un point de vue juridique, il est permit aux jeunes femmes de travailler en tant que femmes de ménage à partir de l’âge de 16 ans. Nous sommes tous conscients qu’en pratique les choses se font autrement. En ce qui concerne les réformes des lois existantes pour les rendre conformes à la constitution, tous les ministères se sont réunis dans une commission qui étudie ces questions actuellement. Nous sommes actuellement entrain de préparer un projet de loi relatif à la lutte contre les violences faites aux femmes. L’harcèlement sexuel est un des crimes les plus difficiles à prouver. Nous sommes actuellement entrain de revoir le texte afin de rendre la preuve beaucoup plus simple. Les femmes qui se plaignent ne sont pas nombreuses, en 2014 par exemple nous avons eu 14 affaires portées devant le juge. 

Levée de la réunion conjointe entre les commissions des Droits et Libertés et des Relations extérieures et des Affaires de la femme, de la famille, de l’enfance, de la jeunesse et des personnes âgées à 13h45.