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مرصد مجلس
  • إستماع الى وزير العدل حول مشروع القانون الأساسي عدد 2015/48 المتعلق بالمحكمة الدستورية
ساعة بداية الجلسة المتوقع : 09:30
بداية الجلسة 10:40
نهاية الجلسة 13:30
ساعات التاخير 1س 10دق
معدلات الحضور 66.67%

La commission de la législation se réunit le 22 Septembre 2015 à 10h40 pour auditionner le ministre de la justice concernant le projet de loi organique N°48/2015 relatif à la Cour Constitutionnelle. Mohamed Ennaceur, président de l'Assemblée, ouvre la réunion de la commission de législation générale.

Mohamed Ennaceur (Président de l'Assemblée) :

Nous sommes dans l’obligation de créer des institutions étatiques de la manière la plus consensuelle possible pour que celles-ci soient pérennes et légitimes. C’est dans ce sens que même si nous sommes le pouvoir législatif, nous devons consulter le pouvoir exécutif. Ceci s’inscrit aussi dans le cadre des majorités, même si nous représentons la majorité nous ne pouvons en aucun cas obliger aucun autre parti à suivre et à se conformer à notre vision des choses.

Abada Kefi (Mouvement Nidaa Tounes) :

Notre commission est impartiale et ne travaille l’agenda d’aucun parti politique. Je souhaite vous assurer et assurer au ministre de la justice que nous travaillons dans la plus grande neutralité possible. Nous ne sommes pas exempts des erreurs mais nous n’avons aucune volonté de représenter ou de travailler les intérêts de tel ou tel parti. Je vais laisser la parole au ministre de la justice. Je vous demande de nous fournir une copie de votre intervention. Vous avez tout le temps devant vous, votre intervention ne sera pas limitée dans le temps. 

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa :

Notre réunion aujourd’hui est historique. La présence du président de l’assemblée en est la preuve. Le projet de loi relatif à la cour constitutionnel est le second projet de loi le plus important. Je dirais même qu’il est plus important que le conseil supérieur de la magistrature. Cette cour constitutionnelle mettra en application la constitution qui est le texte suprême de l’Etat. Le point le plus important ici est que la constitution est obligatoire pour tous. Il n’y a aucune institution étatique qui peut se passer de son respect. De ce fait, les décisions de la cour constitutionnelle ont une autorité absolue qui engage tout l’Etat. En ce sens, il est primordial que les membres de la cour constitutionnelle soient compétents, indépendants, impartiaux et expérimentés. On ne pourra pas douter de ces quatre qualificatifs. La seule façon de les garantir est à travers des critères de choix et de sélection de ces membres. C’est en ce sens qu’on a choisi de n’inclure que les plus hauts postes de l’Etat parmi les juges, les professeurs universitaires. On estime par ailleurs qu’il faut un constant renouvellement. Personne ne mets en cause la capacité des autres fonctionnaires qui sont en poste actuellement mais nous pensons qu’il est nécessaire d’effectuer ce renouvellement. Ceci n’a aucun cas pour but de mettre de côté les compétences tunisiennes déjà en poste. Il ne faut pas que cette disposition soit interprétée de la sorte. Un autre point important à respecter est l’entière indépendance et autonomie financière et administrative de la future cour constitutionnelle. La cour constitutionnelle sera spécialisée. Nous avons estimé nécessaire d’inclure le recours par voir d’exception traduit par la question prioritaire de constitutionnalité. Il y a des points positifs et négatifs dans ce choix. Mais nous avons estimé que c’est une bonne chose à inclure. Je vais terminer mon discours par le fait que pour la première fois dans l’histoire de la Tunisie, le pouvoir judiciaire est unifié. 

Abada Kefi (Mouvement Nidaa Tounes) :

Vous avez parlé de compétences. Il faut comprendre que la compétence est une qualité très générale qui peut être interprétée de diverses manières. Voyez vous que ce projet de loi devrait inclure une définition plus spécifique et des critères relatifs à cette compétence. Une autre question est celle de savoir si vous pensez que l’avis de la cour constitutionnelle est un avis obligatoire ou facultatif pour l’Assemblée des Représentants du Peuple ?

Hssan Amri (Mouvement Nidaa Tounes) :

Il y a des gens qui ont démissionné des cour constitutionnelles, comment gérer ces situations ? Par ailleurs l’avis est obligatoire ou facultatif ?

Jihène Aouichi (Mouvement Nidaa Tounes) :

Hier lors de l’audition d’experts constitutionnels il y a eu une proposition de créer une commission de filtration. Qu’en pensez-vous ? Par ailleurs monsieur le ministre vous avez parlé d’indépendance. Comment cela se traduira t’il ?

Ghazi Chaouachi (Courant Démocratique) :

Il y a certains articles qui ne sont pas conformes à la constitution tels que les articles 66 et 67 du projet de loi relatif à la cour constitutionnelle qui ne sont pas conformes à l’article 84 de constitution. Il en est de même pour l’article 40. Ma troisième question est relative aux membres du conseil constitutionnel qui ne peuvent pas être membres de la cour constitutionnelle. Je comprends cela. Cependant je ne comprends pas la raison pour laquelle il est impossible aux membres de l’instance provisoire de contrôle de constitutionnalité d’être nommé à la cour constitutionnelle ? En ce qui concerne le Secrétaire général qui sera désigné par le pouvoir exécutif, j’estime que ceci est une atteinte à l’indépendance de la cour constitutionnelle. 

Rim Mahjoub (Afek Tounes) :

Je souhaite avoir des précisions sur les critères de candidature surtout en ce qui concerne les personnes ayant le diplôme de doctorat. Il n’est pas spécifié dans quel domaine. Dans l’article 30 je pense vous avez parlé du secret des réunions. J’estime que ce n’est pas constitutionnel comme disposition. Je souhaite avoir votre interprétation sur l’article 144 de la constitution qui est traduit dans votre projet de loi. par ailleurs concernant le contrôle des traités et conventions internationales il n’est pas spécifié que faire lors de l’inconstitutionnalité de ces derniers. Il y a plusieurs possibilités à prendre en compte telles que l’émission de réserves, la non ratification ou autres. 

Latifa Habbachi (Mouvement Ennahdha) :

Dans l’article 123 de la constitution on remarque que celle-ci a délégué le choix de l’autorité qu’elle soit une autorité absolue de la chose jugée ou relative. Ce que je remarque par ailleurs est que ce projet de loi délègue aussi ce choix à la cour constitutionnelle. Ma proposition est celle de la notification par la cour constitutionnelle de ses décisions aux présidents (ARP, Gouvernement et Etat) afin qu’ils prennent les mesures nécessaires pour l’application de cette décision. Un autre point, pouvons nous limiter la durée d’examen par la cour afin qu’elle ne prenne pas un temps énorme.

Najla Saadaoui (Mouvement Nidaa Tounes) :

Il y a des personnes qui ont présenté leur démission du conseil constitutionnel, est ce que c’est normal de les « punir » en quelques sorte et de les empêcher de faire partie de la cour constitutionnelle, tout en sachant que ces personnes l sont les « grosses têtes » de la Tunisie. Par ailleurs, en ce qui concerne la limitation d’âge je trouve qu’elle est inutile surtout qu’il y a une obligation d’un minimum de 20 ans d’expérience.

Sameh Bouhaouel (Mouvement Nidaa Tounes) :

Quel est la durée d’application des décisions de la cour constitutionnelle. Sont-elles relatives, dans le sens où elles ne s’appliquent qu’au cas précis ? Sont-elles absolues ? Sont-elles rétroactives ?

Sana Mersni (Mouvement Ennahdha) :

J’estime que le fait de ne pas inclure les personnes de l’ancien conseil constitutionnel à la cour constitutionnelle entre dans la philosophie de la constitution. 

Noureddine Bhiri (Mouvement Ennahdha) :

A mon sens la définition de la cour constitutionnelle doit être explicitement liée à la constitution. J’estime que la définition dont dispose le projet de loi est beaucoup plus général que cela et ça peut ouvrir la porte aux dépassements de la cour. Elle pourra éventuellement traiter des Dossiers qui ne devraient pas relever de sa compétence. Une autre question est relative à la condition de détenir la nationalité tunisienne. Ce n’est pas normal car une personne peut devenir tunisienne un jour avant l’ouverture des candidatures et elle sera de ce fait éligible. Une autre condition d’éligibilité est la non appartenance à aucun parti politique. Qu’en est-il des partis politiques secrets qu’il y avait il y a de ça dix ans ? On ne peut vraiment pas savoir. 

Noureddine Ben Achour (Union Patriotique Libre):

La cour constitutionnelle se doit de garder son unité mais il se peut qu’il y ait un avis contraire. Comment éviter cela et garantir l’unité de la cour constitutionnelle ?

Mourad Hamaidi (Front Populaire) :

Je trouve que c’est injuste d’empêcher les membres de l’instance provisoire de contrôle de la constitutionalité d’être membres de la cour constitutionnelle. De plus, en ce qui concerne la nationalité tunisienne, il n’est pas spécifié l’ancienneté de cette nationalité, ni la possibilité ou non d’avoir une autre nationalité. A mon sens devenir membre de la cour constitutionnelle doit être plus difficile que de devenir président de la république. 

Karim Helali (Afek Tounes) :

Je suis d’accord avec Mourad et Noureddine concernant la nationalité tunisienne qui doit absolument avoir une certaine ancienneté. L’absence d’une double nationalité est aussi une obligation à mon sens. En ce qui concerne l’interdiction des membres de l’ancien conseil constitutionnel de siéger à la cour constitutionnelle je trouve que c’est injuste. Il est vrai que certaines personnes ont été corrompues mais pas toutes. 

Fin des interventions. Adaba Kefi lève la séance pour un quart d’heure pour permettre au ministre de la justice de préparer ses réponses. Levée de la séance à 12h00. 

Reprise de la séance à 12h25. Le ministre de la justice procède à la réponse aux questions posées.

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa : L’interprétation de ce projet de loi ne doit pas être faite de manière littérale. Les décisions de la cour constitutionnelle ne peuvent pas avoir un caractère de simple avis. Ça relève du bon sens.

Abada Kefi (Mouvement Nidaa Tounes) :

Le rôle de la cour constitutionnel n’est pas d’amender la constitution. C’est le rôle de l’Assemblée des Représentants du Peuple. C’est la que se trouve le danger. Si l’Assemblée décide un jour d’enlever la république, il n’y aura aucun contrôle de la Cour Constitutionnelle. C’est vraiment dangereux. 

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa :

C’est la raison pour laquelle le terme avis ne peut pas exister dans ce projet de loi. Il faut le changer en décision. 

Latifa Habbachi (Mouvement Ennahdha):

Je vais vous expliquer concrètement ce qui s’est passé à l’Assemblée Nationale Constituante. Il n’y a pas eu de coordination entre les travaux des commissions d’où cette absence de clarté concernant les termes « avis » et « décision ». Même si on revient aux procès verbaux et aux travaux préparatoires on va voir cette absence de coordination.

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa :

On doit donc prendre le terme « avis » avec des pincettes. On ne veut pas tomber dans ce qu’Abada Kefi a expliqué. Il est clair qu’il y a énormément de contradictions et de termes ambigus dans la constitution. Passons aux amendements de la constitution. Ce qui existe même en droit comparé est l’absence de contrôle des amendements de la constitution. Ceci ouvre le débat de la supra constitutionnalité. Georges Vedel par exemple défend sa non existence. C’est une des raisons pour laquelle le contrôle des amendements de la constitution n’a pas été inclus dans ce projet de loi. La question d’appartenance aux partis politiques, quand il s’agit de 10 ans, on peut en discuter. Mais je vais vois expliquer la raison de ces 10 ans. La durée a son poids ici. Cette certaine distance créée une indépendance et une neutralité. Notre constitution aujourd’hui a placé la cour constitutionnelle dans le pouvoir judiciaire. Dans l’article 103 la constitution a placé les critères du juge, qui est aussi applicable à la cour constitutionnelle. Ces critères sont la compétence, l’impartialité aussi est spécifiquement disposée. Je vous pose la question, le fait d’appartenir à un parti politique ne vous rend il pas partial ? Ça va plus loin que l’indépendance, c’est beaucoup plus spécifique. De ce fait, cette obligation de ne pas appartenir à aucun parti politique doit être comprise ici comme étant une garantie de l’impartialité. Elle n’a pas vocation à empêcher telle ou telle personne de siéger à la cour constitutionnelle. En ce qui concerne les personnes qui ont démissionné je peux comprendre leur éligibilité. En ce qui concerne la commission de filtrage, c’est vrai que ça fera du travail supplémentaire mais j’estime que c’est obligatoire. En ce qui concerne les conséquences du recours devant la cour constitutionnelle, on ne s’est pas mis d’accord sur la portée du jugement, s’il est absolu, relatif, rétroactif. On a décidé de prendre exemple sur le système français qui module les effets. Par exemple, en cas d’annulation de la loi, l’effet peut avoir lieu dans 6 mois, 1 an. C’est la cour constitutionnelle qui décidera. Il faut comprendre ici la différence entre la voie d’action et la voie d’exception.

Abada Kefi (Mouvement Nidaa Tounes) :

Si le parlement ne corrige pas la loi en question, l’annulation est de facto après l’écoulement du délai donné par la cour constitutionnelle. Qu’en est-il de la personne qui a une affaire en cours devant le juge ? On comprend que le jugement est suspendu le temps que la cour constitutionnelle donne sa décision. Mais après ? Le jugement reprend son cours ou on attend l’écoulement du délai ?

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa :

Je ne peux pas prédire ce que la cour décidera mais c’est logique que le jugement soit suspendu le temps que la cour donne sa décision.

Rim Mahjoub (Afek Tounes) :

Qu’en est-il des affaires qui seront liées à cette même loi après la question prioritaire de constitutionnalité ?

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa :

C’est la cour constitutionnelle qui décidera si l’effet est absolu ou relatif. C’est elle qui décidera si une tierce personne verra cette loi utilisée dans une affaire la concernant ou pas. En ce qui concerne la compétence, le diplôme n’est pas une garantie absolue, ceci dit, il est obligatoire. Concernant le secret des sessions, elle garanti la sérénité. Tu discute en toute liberté et tranquillement. Quand ça devient public le juge pourra avoir du mal à parler librement. Il faut garantir une indépendance de la cour.

Latifa Habbachi (Mouvement Ennahdha) :

Ceci n’empêche qu’on peut rendre la première session publique quand il s’agit d’une question prioritaire de constitutionnalité.

Abada Kefi (Mouvement Nidaa Tounes) :

Aussi en cas d’audition d’experts par exemple.

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa :

Oui je suis d’accord c’est une possibilité.

Noureddine Bhiri (Mouvement Ennahdha) :

Non je suis désolé mais la règle doit être la publicité et l’exception le secret. La constitution a été claire sur ce point.

Ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa :

Oui mais la constitution m’a donné le droit de l’exception donc je l’utilise. En ce qui concerne l’âge, je vais vous parler honnêtement et compte tenu de mes 37 ans d’expérience. Les conflits juridiques constitutionnels sont les plus compliqués qui existent. J’estime que le suivi du droit, traduit par l’expérience de 20 ans est nécessaire. L’âge de 45 ans est aussi nécessaire. Je n’ai rien contre la jeunesse, mais il faut quand même une certaine expérience et une certaine maturité. 45 ans est le minimum à mon sens. En ce qui concerne la nationalité, je n’ai pas de souci à rajouter une ancienneté, 5 ans ou plus. Les recours en référé et leur délai est inscrit dans la constitution. Il est de trois mois. La question des conflits de compétence regroupe les négatifs et positifs. C’est une expression large qui comprend les deux. On n’a pas besoin de spécifier. 

Fin de l’intervention du Ministre de la Justice. Abada Kefi le remercie de sa présence et lève la séance à 13h30.